Congrès EHA/EHDN 2012

Françoise GERMAIN nous a communiqué le résumé de ce congrès que vous trouverez ci-dessous. En voici le sommaire qui vous permet d'atteindre directement les différents articles en cliquant sur ce qui vous intéresse :

 

Meeting de Stockholm, septembre 2012

Le meeting du réseau européen EHDN (European Huntington Disease Network) s’est tenu au mois de septembre 2012 à Stockholm. Il a réuni des chercheurs, des professionnels de santé, des représentants d’établissements d’accueil et d’organismes d’accompagnement, des associations de familles ainsi que des laboratoires pharmaceutiques.

 

Il était suivi du congrès de l’Association Huntington Européenne EHA ; l’an prochain, le congrès international sur la maladie de Huntington se tiendra à Rio de Janeiro, avec l’EHDN et l’association Huntington internationale IHA.

 

Ce meeting a réuni 650 participants. Le professeur Lanwerhrmeyer a énoncé les points essentiels qui mobilisent les acteurs sur la maladie de Huntington : c’est une maladie monogénique, ce qui la rend plus facile à appréhender que d’autres maladies génétiques et la communauté MH est bien organisée dans son engagement au sein des essais cliniques.

 

Des scientifiques ont présenté l’avancement de leurs recherches, dont les domaines et les approches sont multiples : nouvelles pistes sur la modification des gènes, sur les greffes, rôle de la protéine huntingtine, recherches sur les mécanismes à l’échelle moléculaire et cellulaire et action de molécules identifiées pour les modifier, recherche de biomarqueurs, expérimentations sur des modèles animaux… tout converge pour que de réels progrès puissent être réalisés.

 

De grands laboratoires de l’industrie pharmaceutique étaient présents : Pfizer , Sanofi… laboratoires qui étendent maintenant leurs programmes de recherches à la maladie de Huntington.

 

Le secteur des soins et de l’accompagnement des malades était présenté par les établissements d’accueil, essentiellement dans les pays de l’Europe du Nord ainsi que par des groupes de travail de l’EHDN.

 

"Il y a encore beaucoup à apprendre pour améliorer le bien-être des malades au quotidien et celui de leurs proches, on a besoin de vous, les familles et les patients pour y arriver" dit le professeur Lanwerhrmeyer.

 

Des moments forts ont été les témoignages de personnes impliquées directement par la maladie. La rencontre entre chercheurs, professionnels de santé, professionnels de l’industrie pharmaceutique, membres de l’EHDN et membres des associations de familles ont permis des échanges ouverts et des avancées de collaborations entre ces divers acteurs de la lutte contre la maladie.

 

Notre ami Philippe Chèhère a présenté un poster sur ses activités et ses projets. Les danseurs chorégraphes Philippe Chéhère, Julie Salgues et Anatoli Vlassov, en collaboration avec des médecins et des spécialistes, réalisent des ateliers de recherche chorégraphique pour les personnes atteintes par une maladie génétique liée aux mouvements, à Paris, depuis 2003.

 

Philippe Chéhère prépare une thèse sur l’évaluation des effets de la danse sur les patients et accompagnants.

 

Des réseaux de jeunes sur internet

Matt Ellisson a crée aux Etats-Unis l’association HD-YO (prononcer io) ; son père est tombé malade lorsqu’il avait 7 ans et jusqu’à 20 ans, il a cherché autour de lui et sur internet des informations. Celles qu’il a trouvées n’étaient pas pertinentes pour son âge et ses préoccupations. Il a constaté que le monde associatif comme le monde de la recherche ne s’adressent pas aux enfants dont les parents sont touchés par la MH, ni aux adolescents, ni aux jeunes adultes.


Aidé par une équipe de jeunes bénévoles, il a crée un site qui est destiné aux jeunes. Le site a reçu 150 000 visites à ce jour ! Il cherche de jeunes traducteurs anglais-français !


L’association HUNTINGTON-ACTIONS, créée par de jeunes français a maintenant un site et un forum.

 

La maladie de Huntington est moins rare qu'on ne le pense

Au meeting de Stockholm, le Pr Hayden (Canada) a présenté ses recherches sur l’âge d’apparition de la maladie. On sait qu’elle apparaît en moyenne vers 40-45 ans, mais le Professeur Hayden affirme que la maladie de Huntington est une maladie commune de la vieillesse.

 

La mutation génétique responsable de la maladie consiste en un trop grand nombre de triplets CAG sur le chromosome 4. Lorsque le nombre de triplets est supérieur à 36, la maladie apparaît typiquement vers 40 ans. Lorsque le nombre de triplets est compris entre 27 et 35, la maladie apparaît rarement avant 60 ans, souvent vers 70 ans et plus. Les symptômes sont alors différents et la maladie n’est pas toujours diagnostiquée au premier abord.


Le nombre de cas de cette forme tardive augmente simplement en raison de l’allongement de la vie, important depuis 50 ans. Le nombre de malades en France est estimé à 6 000 actuellement, mais si l’on fait une estimation à partir des données du Pr Hayden, incluant la forme tardive, il pourrait atteindre 10 000. Il reste à mieux connaître cette "forme tardive".

 

Programmes d'observation

Après deux ans d’études, les résultats du programme d’observation TRACK-HD sont parus en décembre 2011. Il rassemblait des patients aux premiers stades de la maladie et des personnes présymptomatiques. Le croisement des données recueillies révèle des changements au cours du temps chez les personnes faiblement atteintes ou présymptomatiques au début de l’observation : perte de volume du cerveau (par IRM 3T), atteinte de la mémoire et du raisonnement, difficultés dans les tâches motrices, mouvements des yeux…

 

Bien que l’étude directe des personnes soit terminée, les images d’IRM continuent à être analysées, ainsi que les prélèvements sanguins. Les résultats de cette étude laissent envisager une possibilité de traitement même au stade présymptomatique. D’autre part, ils permettent aux médecins et scientifiques de sélectionner les personnes participant aux essais cliniques, ainsi que d’en recruter un nombre suffisant mais pas trop important pour obtenir des réponses significatives.

 

Le programme REGISTRY de l’EHDN,  étude longitudinale multicentrique d’observation et de prospective a été subventionné par la fondation CHDI. Il a permis de collecter des données phénotypiques dans 17 pays européens. Les données ont été recueillies auprès de 9 000 participants et des échantillons biologiques auprès de 6 000. Leur exploitation permettra de mener à grande échelle des études sur des modificateurs génétiques et sur les biomarqueurs.

 

Ce programme REGISTRY (en Europe) fusionne maintenant avec le programme COHORT (USA) pour former ENROLL-HD qui inclut de nouveaux sites en Amérique latine et en Asie.

 

ENROLL-HD doit ainsi créer une nouvelle plate-forme internationale pour la recherche clinique.

 

Pistes de recherche et voies thérapeutiques

Les essais sur des médicaments

Essai cystéamine-RP103 en phase 2/3. Le CHU d’Angers avec 8 autres centres en France est en phase 2/3 des essais sur la cystéamine. Le laboratoire Raptor (Californie) fournit les capsules de médicament (comprimés avec encapsulation spéciale pour éviter les effets gastriques secondaires) et le CHU d’Angers coordonne l’essai en France.

 

C’est un essai clinique de 18 mois, en double aveugle (le patient ne connaît pas le praticien et réciproquement), contrôlé placebo (une partie des personnes reçoit le produit, l’autre partie un placebo), suivi par une étude pendant encore 18 mois, tous les patients recevant alors la cystéamine. On mesure l’effet du médicament sur l’échelle UHDRS et l’augmentation du niveau de BDNF. On attend des résultats au premier semestre 2014.

 

Essai Huntexyl (ACR16, pridopidine) en phase 3. C’est un régulateur de dopamine produit par le laboratoire Neurosearch (Suède). Des essais complémentaires en phase 3 ont été repris. Ils devraient confirmer une amélioration des fonctions motrices et une diminution de la chorée.

 

Le Lithium en microémulsion en phase 3. En utilisant des doses faibles de lithium en microémulsion, les essais (phase 2) ont été réalisés sur 48 patients en France et continuent en phase 3, pour deux ans, en Europe et en Amérique du Nord (400 participants).

 

Le Lithium par nanoémulsion. Le procédé d’administration du produit est peu invasif, l’absorption se faisant par la muqueuse buccale, en une seule dose ; l’essai se fait actuellement sur des souris et semble donner des résultats positifs.

Les recherches sur les mécanismes de base se poursuivent in vitro

  • Comment fonctionne la huntingtine mutée et pourquoi est-elle toxique ?
  • La phosphorylation joue un rôle dans la formation d’agrégats
  • Le métabolisme insuffisant du glucose affecte les fonctions neuronales

De nouvelles techniques sont explorées

Réduire le gène au silence (Gene silencing)

  • Les protéines en « doigts de zinc » peuvent reconnaître et se lier à des séquences spécifiques de répétitions CAG, empêchant l’expression du gène auquel elles s’attachent, ce qui réduit la production de la Huntingtine mutée.
  • Les oligonucléotides antisens ASOs injectés dans le liquide céphalo-rachidien empêchent la protéine Huntingtine anormale d’être fabriquée dans d’autres parties du cerveau que les ARNi et semblent donner des résultats comportementaux positifs chez les souris et les singes…

Cellules souches pluripotentes induites. Les premières greffes avaient été réalisées à partir de cellules souches embryonnaires, ce qui posait le problème de leur disponibilité ainsi que des problèmes d’éthique, les embryons devant être détruits. On peut maintenant « reprogrammer » des cellules de peau, par exemple pour qu’elles deviennent des cellules souches, ce qui mène à des traitements de remplacement cellulaire. Mais elles ne sont pas encore au point pour les personnes atteintes de la maladie de Huntington…

 

Prix Nobel de médecine 2012 :             cellules souches

Le prix Nobel de médecine 2012 a été attribué, lundi 8 octobre, conjointement au britannique Sir John B. Gurdon, 79 ans, et au japonais Shinya Yamanaka, 50 ans. Dés 1962, Gurdon a montré que la différentiation en cellules spécialisées était réversible et en 2006, Shina Yamanaka découvert que les cellules spécialisées d'un organisme adulte pouvaient être reprogrammées afin de redevenir pluripotentes, comme le sont les cellules souches de l'embryon.

 

Des sites informatiques à visiter

Le site HDBUZZ fournit, en français courant, des articles sur les dernières nouvelles de la recherche : http://fr.hdbuzz.net/

 

Le site du réseau européen donne des informations sur les programmes Registry - Enroll-HD ainsi que sur les groupes de travail du réseau : https://www.euro-hd.net/

 

Pour les jeunes, par des jeunes (en anglais, mais cherche de jeunes traducteurs en français) : http://en.hdyo.org/

 

Accompagnement, environnement et soins

Les soins, le bon environnement, la recherche, le plus tôt est le mieux !

 

Les groupes de travail de l’EHDN (WG) établissent des guides dans différents domaines :

 

Le groupe de travail de l’EHDN "Physiothérapy" avait publié sur internet en 2009 un guide pour les kinésithérapeutes et ergothérapeutes. Un livret en français extrait de ce guide doit être diffusé incessamment aux associations et aux professionnels.

 

Le groupe "Standards of care" a établi des guides sur la diététique, l’orthophonie, les problèmes de langage et de communication, les soins dentaires, l’ergothérapie. Certains sont accessibles en anglais sur le site www.futuremedicine.com. On attend impatiemment leur diffusion libre sur le site de l’EHDN, et en français !

 

De nombreux établissements, essentiellement en Europe du Nord, ont des programmes d’accompagnement d’une part et de réhabilitation multidisciplinaire d’autre part pour des patients MH. On peut citer, en particulier, le centre Topaz d’Overduin (Pays-Bas et différents centres en Norvège et en grande Bretagne.

 

En France, il y a quelques établissements spécialisés : MAS de Cuivry, d’Allauch, de Castelnau-Montratier… ; certaines MAS accueillent 1, 2, 3, 4… patients Huntington, des hôpitaux offrent des courts séjours de réhabilitation, mais la capacité d’accueil est très insuffisante par rapport à la demande.